Nos ordinateurs et smartphones ne sont pas très sympas. Ils nous donnent le mauvais exemple. Une de leurs caractéristiques mises en avant par les services “marketing” est d'être capables de pouvoir faire plusieurs choses à la fois. Et nous, nous pensons que nous pouvons faire pareil. Faux !
Cette erreur fondamentale génère une société de “zappeurs”, qui passent leur temps à ne pas se concentrer.
Vous arrive-t-il de ne faire qu'une seule chose, de vous y consacrer complètement, sans aucune sollicitation externe, dans le silence ? Vous devriez essayer, juste pour le plaisir que vous allez ressentir…
Ah, la vie moderne, c'est bien. On a des dizaines d'amis sur Facebook qu'on ne connaît même pas. Notre téléphone fait “pouic” quand nous recevons un mail. Toutes les connaissances du monde sont à portée de souris ou de tablette, on n'a même plus à taper, il suffit de demander à voix haute à Siri ou à Google Now et hop, les dizaines de résultats apparaissent devant nos yeux ébahis.
La musique est dématérialisée, on l'écoute quand on veut, où on veut, et parfois même quand on ne veut pas, mais c'est une autre histoire…
Bienvenue dans l'inefficacité.
Un oeil sur Youtube, un autre sur la boîte mail, une oreille sur Deezer, l'autre accrochant quelques phrases de la télé en sourdine, et au milieu de tout ça, le cerveau qui doit remplir la déclaration d'impôts. Au secours.
Les enseignants de maternelle (dont je fais partie) fonctionnent souvent en divisant leur classe en trois groupes : “dirigé”, “semi-dirigé” et “autonome”. Et donc, ils semi-dirigent tout en surveillant tout en en dirigeant une séance d'apprentissage. Qui est le moins concentré : l'élève ou le maître ?
Au collège, au lycée, les smartphones, omniprésents, hachent menu l'attention des “apprenants” qui n'apprennent plus rien.
Inutile de continuer cette énumération, elle est infinie. Bienvenue dans le monde multitâche. Bienvenue dans l'inefficacité.
Tiens, je discutais l'autre jour avec Nanoug, et elle m'expliquait que lorsqu'elle avait une idée de livre, elle ne ne pensait plus qu'à ça et ne faisait rien d'autre tant qu'il n'était pas terminé, focalisée à l'extrême sur son objectif. Focalisée. Mot magique. Clé de l'efficacité.
Je sais, certaines d'entre vous vont sourire et dire “les hommes ne savent faire qu'une chose à la fois, les filles sont plus fortes, elles arrivent à jongler”. A jongler, oui, peut-être. A être efficaces, c'est autre chose. Et à quel prix…
Charge cognitive
Il y a quelques temps, lorsque je voulais accomplir une tâche intellectuelle devant mon ordinateur (écrire cet article, par exemple), je commençais par me mettre un peu de musique “zen”, histoire d'être dans l'ambiance. Et hop, une partie de mon attention s'envolait. Là, il est 7 heures du matin, je suis dans le silence, (bon, je vous concède quelques chants d'oiseaux dans le jardin, mais je ne peux quand même pas les éteindre !) j'ai coupé les notifications de mon ordinateur, et je suis focalisé. Et ça me procure une sensation très agréable. J'ai le sentiment d'être efficace. En lien avec le réel. Et d'ailleurs, je le suis.
Un concept explique le pourquoi du comment. C'est celui de la “charge cognitive”.
Extrait de l'article de Wikipedia qui lui est consacré :
“La mémoire de travail ne peut gérer qu'un nombre limité d'informations à la fois, le nombre habituellement avancé étant de 3 à 4 informations. Comme la mémoire de travail est limitée, il est nécessaire que les informations utiles à l'accomplissement d'une tâche puissent rentrer dans les limites de la mémoire de travail. Si un trop grand nombre d'informations demande à être traité simultanément, la charge cognitive est alors trop élevée : la mémoire de travail surcharge, ce qui entraine l'échec de la tâche ou une mauvaise mémorisation en mémoire à long terme.”
En deux mots : en ne faisant qu'une seule chose à la fois, on est bien plus performant.
Et quand on a beaucoup de choses à faire ?
C'est simple : on les fait l'une après l'autre. De manière séquentielle, et non pas simultanée. Parce qu'une mutitude d'informations simultanées entraîne la chute de l'attention.
Lorsqu'on a pigé cette donnée fondamentale, et surtout lorsqu'on la met en pratique, tout change. Ce qui prenait une heure ne prend plus que dix minutes. Vraiment. Ce qui semblait compliqué devient limpide. Notre esprit s'apaise. Nous avons la sensation de maîtriser notre environnement. Et d'ailleurs, ce n'est pas qu'une sensation.
Etre monotâche, ça se découvre, ça s'apprend, ça se maîtrise, et ça peut devenir une habitude.
Une habitude désuète, passée de mode, mais qui devra bien être redécouverte par une humanité en “surcharge informationnelle” qui l'entraînera vers sa perte si elle n'apprend pas à la gérer …
…Une bonne habitude, croyez-moi. Essayez, vous verrez.
Bonjour Michel,
Je suis tout à fait d’accord, toujours à vouloir courir plusieurs lièvres à la fois, je vais suivre tes bons conseils et te dire
comment ça marche pour moi. Merci encore pour tes supers articles!
Merci Di !
Comme le dit si bien le proverbes que tu cites, il faut prendre garde à ne pas être multitâche. Ce qui faisait partie de la sagesse populaire est oublié de nos jours…
Bonjour Michel
merci pour ton article. Revenir à l’ici et maintenant, c’est tout un travail. Mais peux tu me suggérer comment gérer une classe de moyenne section? Doit on faire faire la même tâche à tout le monde?
Merci pour tes suggestions et celles de tous ceux qui voudront bien me donner des pistes d’expérience.
Je suis heureuse de te lire. Tu ouvres des horizons pour moi. Merci d’être là.
Bien cordialement
J’ai fait exprès de parler de l’école maternelle et des fameux “trois groupes”.
Parce que je me suis dit qu’un débat allait se créer et que des solutions allaient être proposées…
Tout ce que je peux te dire, c’est que je préfère mille fois avoir 5 minutes d’attention soutenue de mes élèves (pas forcément dirigée vers moi, bien sûr) qu’une heure de dispersion.
Concernant les groupes, il faut se souvenir que ce système a été créé du temps où les classes maternelles avaient beaucoup, beaucoup plus d’élèves qu’aujourd’hui.
Je ne me considère pas comme un modèle en la matière, mais il m’arrive de faire des dirigés collectifs, et il m’arrive également de laisser la classe entière en autonomie. La véritable autonomie étant la meilleure des situations et celle qui demande bien entendu le plus d’efforts et d’organisation en début d’année…
C’est lorsque tous les élèves sont capables d’évoluer en autonomie qu’on peut le plus facilement avoir des instants de focalisation avec des petits groupes, voire un individu.
Je plussoie. Avec une difficulté particulière quand on enseigne en classe enfantine.
bonjour Michel,
Première fois que je laisse un message, j’ai téléchargé tilekol, merci pour cette aide précieuse.
je suis comme toi en maternelle, et moi aussi, tous les enfants sont en autonomie dans ma classe, ils choisissent leur tâche, rien d’imposé. On va ainsi à leur rythme et ils peuvent se concentrer sur une tâche qu’ils ont volontairement choisie et du coup, se concentrent beaucoup plus et apprennent ! Je suis là pour guider, proposer, et surtout observer.
Merci pour ton article.
Une belle première fois ! J’espère qu’il y en aura d’autres 🙂
Excellent article ! Merci Michel !
Merci Spino pour ton oeil de lynx 🙂
Coucou Michel! Merci de nous rappeler les choses simples que l’on a oublié (un peu…beaucoup?) en courant de toutes parts, en étant hyper-connectés, en voulant répondre à tout le monde à la fois!
Une évidence, oui, mais une évidence que l’on a zappée, hélas!
Alors oui, je vais appliquer pour retrouver efficacité et satisfaction du travail bien fait (enfin j’espère ;-))!
Bonne journée à tous les connectés de Michel et à toi, Michel, un gros bisou!
Il est amusant de voir que les choses les plus simples paraissent compliquées… tant qu’on ne les a pas essayées.
coucou Michel,
Tout çà est tellement vrai, nous sommes continuellement en mode multitâches, du coup on se retrouve en surcharge cognitive, et on se demande souvent par quoi commencer…
Merci pour cet article qui va encore une fois droit à l’essentiel !!
Réapprenons à être monotâche, après tout avec un peu de bonne volonté on devrait pouvoir y arriver !!
bonne fin de semaine !!
Il y a beaucoup à débattre sur le thème de “volonté”.
Et il y a plus simple, plus efficace et plus agréable que l’usage de la volonté : c’est l’habitude.
Mais nous reparlerons de tout ceci dans un autre article…
Ça fait écho à une vidéo intéressante que j’ai vue récemment et qui m’invite à remettre en question ma pratique des groupes en maternelle pour favoriser le travail individuel et librement choisi!
Bonne journée à tous
Joelle
https://www.youtube.com/watch?v=nwVgsaNQ-Hw
Excellente vidéo !
Je voudrais juste connaître le nombre d’élèves par classe ainsi que la surface de ladite classe.
Bonjour à tous
Pour en savoir plus sur l’expérimentation de Gennevilliers:
http://lamaternelledesenfants.wordpress.com/
On compte plus de 25 enfants dans la classe mais les locaux et le matériel sont spécifiques et adaptés, comme elle le précise dans la vidéo.
Bien sur, çà fait rêver et aussi cela bouscule (trop?) notre position d’enseignant.
En tout cas pour en revenir au monotâche ou multitâche, je suis à 100% d’accord avec toi Michel. Et pour ceux qui pensent que c’est difficile, je les invite à faire quelques minutes de respiration consciente dans le calme pour retrouver le plaisir de l’efficacité qui va en découler dans le travail qui suivra…à méditer.
bonne soirée!
Okay pour la phase de concentration extrême. 8 heures de boulot d’affilié sans aucune interruption, dans une maison vidée de ses occupants et voilà 2 semaines de classe de préparées. Mais avant ça, j’ai bien besoin d’une semaine de fouillis créatif, d’essais, d’erreurs, de détours, de renoncements… en fait tous les choix doivent être faits en amont.
Hello soleil29
Pourquoi le fouillis créatif devrait-il être interrompu sans cesse ? Les essais, les détours, les renoncements impliquent la focalisation. Si tu fais des essais tout en répondant à tes mails, ton processus créatif sera entravé…
Bonsoir,
Mono-tache ? impossible pour sans beaucoup d’efforts (surtout dans une classe de 30 sur trois niveaux )mais je connais un ado qui applique le “no-tache” trop souvent à mon goût…
L’ado ne pratique pas vraiment le no-tâche : il n’a jamais goûté aux plaisirs du mono-tâche, parce qu’il est né dans le monde du multitâche.
C’est un secret à lui apprendre : il va apprécier ses nouveaux super-pouvoirs …
Bonjour Michel,
C’est marrant pour un article où tu te dis monotâche et donc super concentré, je ne sais pas si tu as déjà fait autant de coquilles dans un article 😉 !… mais peut-être n’as tu pas eu le temps de te relire. Je ne me moque pas, attention, je suis sans doute la première à faire ce genre d’erreur !!
Sur le fond, je ne suis pas tout à fait d’accord. Il semblerait que certaines personnes, et notamment les enfants précoces, aient au contraire besoin de faire plusieurs choses en même temps, c’est à dire faire travailler plusieurs intelligences (tu connais les intelligences multiples je crois) en même temps, pour être plus efficaces et concentrés. Par exemple, un élève peut être mieux concentré et mieux apprendre s’il bouge en même temps, s’il manipule un objet ou encore s’il écoute de la musique. Il y a même une étude (désolée je ne sais plus trop où j’ai lu ça) qui avait permis d’établir que la musique de Mozart était particulièrement efficace pour effectuer un travail ou un jeu mathématique.
Personnellement, j’ai certaines musiques qui m’aident beaucoup à me concentrer et à être plus efficace quand je travaille le soir, comme René Aubry par exemple.
Bon, voilà, sinon évidemment, je suis plutôt d’accord avec le reste de ton article.
A bientôt.
Sarah.
Hello Sarah
Je suis tolérant avec mes propres coquilles, parce que cela prouve que je ne suis pas perfectionniste et que je ne vais pas me relire pendant des heures 🙂
De plus, même si ce n’est pas une excuse, en ce moment j’ai des petits soucis, je suis en arrêt maladie et donc je n’ai pas l’intégralité de mes facultés…
Sur le fond, maintenant.
Lorsque je parle de monotâche ou multitâche, je parle du traitement des informations que nous recevons. Le fait de se balancer tout en lisant n’est pas une information reçue. Par contre, le fait de s’interrompre dans une tâche parce que notre boîte mail a fait “pouic” est un effondrement de notre productivité.
Concernant la musique, comme je l’explique dans l’article, j’ai récemment changé d’avis, justement après avoir lu un article parlant de la charge cognitive. Je suis un habitué du travail avec fond musical et j’ai toute une collection de musiques à écouter en fonction de telle ou telle ambiance recherchée.
J’ai décidé de faire une expérience et de “tout couper” lorsque je veux me concentrer sur une tâche. Internet, mails, notifications, téléphone, tout. Y compris la musique.
Et à ma grande (et agréable) surprise, j’ai constaté que j’étais nettement plus efficace, et même que je me trouvais dans un état particulier, avec la sensation d’être vraiment seul avec moi-même et totalement connecté à ce que je faisais, sans aucune interférence.
Je me suis dit qu’il serait intéressant de partager ça avec vous…
Tout à fait juste! La “présence” à la tâche entraine une modification de la perception du temps si je puis dire! on trouve que l’on a beaucoup plus de temps et ce que tu dis sur la satisfaction qui en découle est tout à fait réelle! J’avoue n’avoir vécu la chose une fois pleinement! Notre société nous pousse continuellement dans une spirale descendante plutôt que vers l’ascension avec sa profusion d’informations qui n’est jamais de la vraie information d’ailleurs à bien y réfléchir… On nous abrutit et l’homme est faible il aime bien qu’on l’abrutisse! si chacun d’entre nous apprenait à être dans le temps présent, le monde tournerait autrement! enfin il est temps de réagir… Merci de nous rappeler tout ça!
Bonjour Christine
Je ne pense pas qu’on cherche à nous abrutir…
Je pense simplement que le progrès technique provoque en ce moment même un bouleversement gigantesque de la masse d’informations (bonnes ou mauvaises) qui percutent les milliards d’humains en permanence.
C’est inédit dans l’histoire de l’humanité. Il va falloir du temps à l’espèce humaine pour comprendre ce qui se passe, constater les conséquences et trouver des stratégies d’adaptation.
En attendant, une petite prise de conscience au niveau individuel ne peut pas faire de mal 🙂
Merci pour tes articles qui nous forcent à réfléchir sur nos pratiques. Je vais essayer d’être plus efficace aujourd’hui .
et quand on est multi-pensées..comment on fait ?
Le fait d’accomplir une tâche après l’autre permet de calmer son usine à pensées…