Impossible de commencer l'année sur ce blog sans évoquer le traumatisme du 7 janvier 2015. Deux autres drames, de la même veine, me sont immédiatement revenus à l'esprit : l'assassinat de John Lennon et le 11 septembre.
Coïncidence : quelques jours après “Charlie”, je me suis retrouvé à New York, sur les lieux de ces deux précédentes tragédies.
L'occasion de méditer sur les thèmes de la mémoire et du non-oubli. Ceux qui ont voulu effacer à jamais ont en réalité rendu indélébile pour toujours.
Vous permettez ? Je vais être un peu personnel dans cet article et évoquer avec vous certains moments de mon existence. Parce que, certains jours, certaines heures, restent à jamais fixés dans nos esprits et que l'envie nous vient naturellement de les partager.
1980
8 décembre 1980 : John Lennon est abattu devant chez lui, à New York, en face de Central Park.
L’ex-Beatle, musicien, chanteur, intellectuel, artiste influent était un leader poétique. L’annonce de la mort (par arme à feu) de ce chantre du pacifisme a provoqué un choc considérable chez une génération (ou plusieurs) de fans qui ne sont toujours pas remis, 35 ans plus tard.
(Ce jour-là, je suis à Marseille, et j’enregistre sur une mini-K7 l’émission hommage de Bernard Lenoir, sur France-Inter. Il était en studio avec François Jouffa et discutait en direct avec Jean-François Vallée qui témoignait de l'ambiance qui régnait à New-York. J’ai toujours cet enregistrement ! Je l'ai réécouté hier. Je ne l'avais jamais fait. Il est en parfait état. Drôle de sensation. J'ai numérisé la bande, je mettrai peut-être l'enregistrement en ligne un de ces jours…)
2001
11 septembre 2001 : deux avions percutent les tours du Word Trade Center, à New York, lors d’une attaque terroriste foudroyante.
2573 personnes, dont 343 pompiers venus en secours, périssent, sans compter les 224 victimes de l’attaque du Pentagone et de la chute du vol UA93 sur Shanksville. Le monde entier est sous le choc.
(Ce jour-là, je suis en vacances en Espagne et j’apprends la nouvelle par l’auto-radio de ma voiture, en revenant d’une partie de pêche. C’est totalement surréaliste. A la télé espagnole, comme partout dans le monde, les images non seulement tournent en boucle, mais nous font suivre le film des événements qui n'en finissent pas. Le monde bascule, en direct et en couleurs.)
2015
7 janvier 2015 : deux hommes armés pénètrent dans les locaux de Charlie-Hebdo, journal satirique français, et abattent 11 personnes, dont les dessinateurs Cabu, Wolinski, Honoré, Charb et Tignous. La France est tétanisée.
(Ce jour-là, je suis à Marseille, chez mon frère. Les yeux rivés sur l’écran de la petite télé de la cuisine. Désolé, amis de Tilékol, mais j’ai été incapable, à chaud, de vous poster quoi que ce soit à ce sujet.)
8 janvier 2015 : je suis dans l’avion de British Airways, destination New-York, un voyage décidé quelques jours avant sur un coup de tête. Bien entendu, les contrôles à l'aéroport ont été ultra-pointilleux, et bien entendu, à 10 000 mètres d'altitude, j'ai un peu la trouille.
10 janvier 2015 : je suis sur le site de Ground Zero, où deux grands bassins symbolisent les deux tours manquantes. Un musée a été construit au sous-sol. A la fois un lieu de souvenir, une trace historique des événements et, plus surprenant, une oeuvre d’un esthétisme extraordinaire, mettant en scène les ferrailles tordues, les poteaux calcinés, les camions de pompiers écrasés. Ce musée sera là pendant encore bien longtemps, et des millions de personnes le visiteront. Les tours du 11 septembre ne seront jamais oubliées, pas plus que les personnes qui y ont perdu la vie.
11 janvier 2015 : je suis à Central Park, sur le lieu où John Lennon est tombé. Une rosace en mosaïque sur le sol matérialise le mémorial. Il est tard, il fait nuit, il fait froid, il pleut, et pourtant plusieurs petits groupes de personnes sont présents et se recueillent à tour de rôle. La scène se répète jour après jour depuis 35 ans.
14 janvier 2015 : Le numéro 1178 de Charlie Hebdo est tiré à plus de sept millions d'exemplaires. C’est le plus grand tirage d’un journal français de tous les temps, paraît-il. 120 000 personnes se sont abonnées (alors qu’elles n’étaient que 7000 auparavant).
Et vous, que faisiez-vous ces jours-là ?
(Bien entendu, ceux qui n'étaient pas nés en 1980 sont excusés…)
Traduction (un peu libre, pour garder la poésie du texte) de “Imagine”, la chanson de John Lennon :
Imagine
Imagine qu'il n'y ait pas de Paradis,
C'est facile si tu essaies
Aucun enfer sous nos pieds,
Au dessus de nous seulement le ciel…
Imagine tous les hommes,
Vivant l'instant présent…
Imagine qu'il n'y ait pas de pays,
Ce n'est pas difficile,
Aucune cause pour laquelle tuer ou mourir,
Aucune religion non plus…
Imagine tous les hommes,
Vivant leur vie en paix…
Tu peux me traiter de rêveur,
Mais je ne suis pas le seul.
J'espère qu'un jour tu nous rejoindras,
Et que le monde vivra uni
Imagine qu'il n'y ait pas de possessions,
Est-ce que tu le peux ?
Nulle avidité, nulle faim,
Des humains fraternels…
Imagine tous les hommes,
Se partageant le Monde…
Tu peux me traiter de rêveur,
Mais je ne suis pas le seul,
J'espère qu'un jour tu nous rejoindras,
Et que le monde vivra uni
Et pour finir, quelques images du musée de Ground Zero. Il justifie à lui seul le voyage !
Vous pouvez cliquer sur les images pour les agrandir…
Bravo ! Tout est culture, la beauté comme la dureté de la vie.
Et mille fois oui pour la mise en ligne de l’émission de Bernard Lenoir. Sa voix me (nous ?) manque.
Merci !
J’ai cherché sur le web des traces de cette émission mythique et je n’ai rien trouvé.
Cette cassette qui est restée 35 ans dans sa boîte est vraiment bien conservée. Il faut que je trouve comment exporter en MP3 à partir d’Audacity, puis que je trouve le moyen de mettre en ligne le fichier.
Ca doit pouvoir se faire 🙂
Ah, Bernard Lenoir et “Feedback” le soir sur France Inter dans les années 80… C’était quelque chose !
Il y a aussi la question des droits d’auteurs…
pour moi c’était le Lenoir des années 90 ! ‘Le Soir, C’est Lenoir’ était le nom de l’émission je crois.
Le 11 septembre 2001, je sortais de mon second et dernier cours de danse orientale, à Beyrouth. C’était une belle journée. J’étais avec une amie. Nous avons entendu les gens parler de l’attentat. Je suis rentrée chez moi très vite et sur l’écran, j’ai vu ces minuscules petits points noirs qui tombaient des fenêtres des tours. J’ai mis quelque secondes à comprendre que chacun de ces petits points était une personne. Un être humain qui s’était jeté dans le vide pour ne pas périr dans la fournaise. Malgré mes 12 premières années passées dans la guerre, j’ai été pétrifiée par la violence de cette image. Non, on ne s’habitue pas.
Merci pour ces témoignages! J’ai toujours un peu de mal à mettre des mots sur mes pensées, vous le faites avec merveilles!
Et si la santé est ce que je souhaite le plus aux gens que j’aime, cette année j’y rajoute la paix!
Coucou !
Le 8 décembre 1980, j’étais à la maternité à Lormont près de Bordeaux et venais d’accoucher de mon second garçon et profitais de son second jour de vie……… le choc, l’incompréhension, les larmes,…..
Le 11 septembre 2001, j’étais à l’école Madame Roland à Perpignan et une collègue est arrivée en nous disant ce qui était arrivé et pensait que cela allait être la guerre….. le choc, l’incompréhension, les larmes,…
Le 7 janvier 2015, je préparais mon départ pour l’île Rodrigues et j’ai lu cela sur Facebook……. le choc, l’incompréhension, les larmes… et je peux dire que je n’étais nullement une fan de ce journal mais à ce jour, je ne comprends toujours pas et je n’accepte toujours pas.
Papa me disait arrête de demander pourquoi, cela rend fou…. Il avait raison, donc je ne me pose pas cette question mais je suis révoltée… Je pense à ceux et celles qui restent, je pense aux gens qui ont fait cela, et tout se bouscule dans ma tête… Qui sommes-nous les uns vis-à-vis des autres, nous tous bien pareils et si différents ??? Bonne et heureuse année à tous et à toutes. J’ai mal, vraiment mal….
Le 11 septembre 2001, je ramais dans une classe de CE1 , premier poste dans un quartier sensible, je me désolais en me regardant le nombril….Et puis la nouvelle est tombée , brute, et puis les images…..Et tout change !
8 décembre 1980, assassinat de mon Beatles préféré.
11 septembre 2001, l’inimaginable, des images en boucle sous divers angles…
et dans la région toulousaine où je vis, je rajouterais le 21 septembre de cette même année. J’étais à ce moment là enseignante “itinérante”. J’étais en voiture lorsque j’ai entendu à la radio l’annonce de l’explosion d’AZF. C’était la confusion au début, on parlait même d’une éventuelle attaque terroriste. Depuis j’ai toujours une certaine méfiance avec ces informations en direct.
Tout le monde avait un membre de sa famille, des enfants étudiants à Toulouse. Pas moyen d’avoir des nouvelles, pas de possibilités de communication téléphonique et des informations alarmantes; 31 morts, 2500 blessés… Aux récréations on allait s’enfermer dans une voiture pour écouter la radio. Je me souviens qu’avec les élèves je faisais de la technologie “les leviers”. La journée a été très longue.
Et puis en mars 2012, nous avons eu aussi Mérah, les sorties en récréation supprimées, les enfants qui avaient des bribes d’information, l’angoisse des parents…
Et 7 janvier 2015, un mercredi, je rentrais chez moi à midi quand j’ai entendu l’annonce à la radio. C’était encore confus. On n’en disait pas trop sur l’horreur. Cabu, Charb, Wolinski, Tignous, Maris (pour ceux que je connaissais) ne pouvait pas être tous dans les victimes. Qui pouvait en vouloir à tous ces gentils? Tout de suite, besoin d’en parler avec quelqu’un, une envie d’agir, de dire STOP. On atteignait le coeur du pays, sa liberté d’expression, la liberté de penser, le respect des cultures, des religions. Et les mouvements qui ont suivis ont soulevé le pays qui a voulu parler d’une seule voix “je suis Charlie”. Et je n’ai lus de mots pour conclure…
ou si envie d’apprendre aux élèves à exprimer leurs colères, leurs désaccords par des mots, des dessins, de l’indifférence… mais jamais par de la violence.
Bonjour Martine
Il est vrai que les toulousains ont été durement touchés.
AZF, Merah…
AZF a dû être terrible, juste 10 jours après le 11 septembre… Je pense que dans l’esprit de nombreux français, ce qui s’est passé ce jour-là est encore confus…
Merci pour ton témoignage !
C’est la première fois que je participe à un échange mais appréciant particulièrement le site Tilekol et les billets de Michel, je me décide à relayer les paroles de Martine qui m’ont touchée.
Je suis toulousaine de naissance.Lors du 11 septembre 2001, nous étions à l’école bien sûr, j’étais alors en maternelle. Nous avons vu les premières images entre collègues dans un état de sidération, incapables d’exprimer la moindre impression tant les faits étaient humainement impensables (et pourtant des cerveaux humains l’avaient préparés avec une implacable minutie).
Effectivement, 10 jours après, encore dans une grande perplexité sur la nature humaine et sur l’évolution des relations internationales, un matin,en classe, à 10 heures vous vous apprêtez à sortir en récréation avec vos élèves et vous entendez une explosion ,la porte extérieure se referme devant vous et vous sentez quelques secondes après le souffle de l’explosion qui passe dans la classe ,vide à cet instant.Pas de dégâts matériels pour nous mais une situation d’urgence à gérer avec des Petits, très difficile car vous n’êtes pas seulement, à cet instant, une enseignante, mais aussi une mère et une épouse. L’angoisse vous étreint quand vous voyez à la télévision de la salle polyvalente les premières images :un mari travaillant en face de l’usine ce jour-là, et un fils dans une autre école maternelle plus proche du site.Vous gérez les angoisses de tous, parents affolés accrochés aux grilles, enfants apeurés dans l’incompréhension de l’enfermement. Plus aucune communication, effectivement,et le silence après l’explosion.
Vous ne quittez le site qu’après avoir restitué tous les élèves aux parents:4 longues heures ou vous ne savez rien de votre propre famille.Le fils récupéré heureusement sain et sauf, vous apprenez que votre mari est blessé(à quel degré de gravité, vous ne le savez pas) mais on vous demande de venir le chercher par vos propres moyens
tellement les services d’urgence sont débordés. Oui, ce fut une très longue journée. Il en a résulté des arrêts de travail successifs du conjoint, plusieurs opérations, une délocalisation de son site professionnel pendant des années,un véhicule “implosé” sur le parking de l’entreprise.Le mois de septembre n’est plus un mois où nous ne pensons qu’à la rentrée des classes, c’est un mois du souvenir de ce triste paysage lunaire ,presque de guerre d’après explosion.
Tout s’est reconstruit petit à petit mais même tant d’années après nous sursautons à la moindre petite explosion à proximité.
Et puis,une dizaine d’années après,l’épisode Mohamed Merah avec effectivement les récréations supprimées, la vigilance à chaque sortie et entrée,des élèves de primaire inquiets, voire anxieux qui craignaient pour leur vie et que pouvions nous leur répondre pendant ces longs jours de recherche troublés par des annonces contradictoires ? Comment répondre à des élèves qui se demandaient pourquoi un homme avait tué des enfants?Nous étions nous mêmes dans l’incompréhension. Vous annulez la classe découverte prévue en centre ville de longue date et vous essayez de travailler avec la sérénité nécessaire pour vos élèves.
Ce furent deux épisodes professionnels particulièrement marquants.
Et puis arrive le 7 janvier 2015 à 12h00,vous rentrez chez vous et vous allumez la télévision pour suivre les actualités de la mi journée comme à l’habitude et vous entendez les premières informations sidérantes, la même sidération que le 11 septembre 2001 mais elle vous touche de plus près au plus profond : votre enfance avec Cabu et Wolinski,votre adolescence avec Charlie Hebdo, votre ville encore avec Bernard Maris toulousain ,que j’appréciais, parmi les victimes.Ce sont les larmes et une vive douleur ressentie comme le dit si bien Martine en plein cœur :la liberté était atteinte au plus profond de notre esprit et de l’esprit républicain de notre pays.
Pour nous, toulousains, beaucoup de douleurs ont ressurgi et les jours suivants ont été lourds à vivre avec la même incompréhension ressentie 3 ans auparavant. Difficulté manifeste à en parler,l’émotion étreint et les mots ne viennent pas. mais nous nous sommes retrouvés nombreux côte à côte pour défiler et exprimer notre détermination à rester debout, nombreux, très nombreux.Il ne faudra surtout pas en rester là.
Comme Martine, cet événement m’a amenée à ajouter un cran de plus dans ma volonté d’apprendre aux élèves à s’accepter malgré leurs différences, leurs opinions divergentes et à renforcer le dialogue entre eux.Ce temps là ne sera jamais du temps perdu.
Mon billet était peut-être un peu long , c’est un témoignage parmi tant d’autres et je vous remercie de m’avoir permis de le faire partager.
Merci beaucoup pour ton témoignage, Corine.
1980, aucun souvenir du haut de mes 8 ans.
11 septembre 2001 : j’apprends à la sortie des classes par un parent qu’il y a deux avions qui ont été détournés et ont détruit les tours jumelles .Ça parait être une mauvaise blague, un truc incroyable ! Quand je réalise que c’est vrai, panique à bord, ma sœur travaille non loin de là . Les communications sont coupées, pas de nouvelles jusqu’au lendemain. Heureusement pour elle, elle avait du retard et a été prise dans les bouchons.Elle m’a raconté qu’elle n’avait pas été informée immédiatement, on parlait d’un vague accident. Ce n’est que bien plus tard qu’elle a appris la tragédie et qu’elle nous a appelés. Je pense beaucoup à toutes les personnes innocentes qui n’ont pas eu la même chance qu’elle et qui ne sont pas rentrées chez elle le soir …
7 janvier 2015 : il me faut encore du temps pour réaliser, chercher à comprendre ce qui est incompréhensible. Après s’être attaqué au symbole du capitalisme Américain, les terroristes s’attaquent à un symbole fort des Français : la liberté. En voulant semer la terreur, ils ont ressoudé la France et remis en valeur nos libertés.Je pense aussi à la chanson de Florent Pagny “Ma liberté de penser” : “Non vous n’aurez pas ma liberté de penser !”
En 2001 mon fils a un an et tout le monde évoque une future 3 ième guerre mondiale, je m’affole et rentre chez moi chamboulée, attristée, paniquée… Ce 7 janvier, je découvre que cabu mon chouchou du club Dorothée a été assassiné horreur ! c’est tout un pan de ma vie qui se fissure….
Ma seconde fille est née le 13 septembre 2001, avec 3 jours de retard… Ne voulait-elle pas voir cette horreur en direct ? Nous avons acheté, pour elle, les journaux du jour de sa naissance qui relatent les évènements du 11 septembre. Dans la journée du 11, une voisine, un peu vieille et sénile, me parlait d’avions qui étaient rentrés dans des immeubles et lui disaient “oui-oui…” pensant qu’elle perdait définitivement la tête, ce qu’elle racontait était tellement impensable !!!
Et ce début d’année 2015… comme évlyn, je revois Cabu avec Dorothée et j’entends le feutre de Cabu crisser sur sa feuille…
Aujourd’hui, je me demande quel est ce monde que nos enfants et élèves.
Nous avons la chance de pouvoir agir sur les jeunes générations et essayer de leur inculquer l’essentiel des valeurs, mais qu’est-ce que cette goutte d’eau face à tant de haine.
Je fais partie des excusés pour 1980, je n’étais pas née.
En 2001, j’étais encore au stade du lycée. Je n’avais eu cours que le matin, et en rentrant à la maison, toutes les chaînes de télévision passaient le même mauvais film d’action. Dur à réaliser, mes enseignants de l’époque ont tous eu une façon de “debriefer” l’actualité.
7 janvier 2015, j’ai appris la nouvelle à la radio, 2 minutes avant de me garer devant chez moi. Besoin d’en savoir plus : qui ? quoi ? où ? comment ? POURQUOI ? Les réactions des uns et des autres sur les réseaux sociaux m’ont fait chaud au coeur, et les marches du week end également. Le monde n’est finalement pas tout noir ou tout blanc…
Je me revois dans ma classe au fond des Cévennes , face à la montagne , écoutant en boucle la radio ce 11 septembre 2001 !complètement sidérée
ce 7 janvier , j’ai entendu les noms des victimes , j’ai coupé la radio et la télé… pour que mes enfants n’assistent pas à ce torrent d’images. Et puis j’ai réfléchi à comment j’allais leur en parler… et j’ai eu du mal .
Le lendemain en classe , mes bouts de choux de 6 ans avaient presque tous tout vu, tout pris dans les yeux , sans comprendre … et là aussi ça a été dur. Une de mes élèves , m’a dit ,”maîtresse on va arrêter d’en parler parce que là tu vas te mettre à pleurer ! ” .Elle avait bien raison !
Petite phrase entendue en BCD : Mes cp regardant une BD, il y en a un qui dit à son copain “on dirait du Wolinski tu trouves pas ?”
15 jours avant on n’aurait jamais entendu ça …
Ils sont chouettes quand même ces petits
Comme nombreux ( les anciens sans doute!), j’étais en classe le 11 septembre de même que le 7 janvier avec une petite anim péda l’après-midi; Mes collègues et moi avons passé une partie de cet après midi du 7 a essayer de comprendre, trouver des infos sur internet et savoir ce que nous allions dire, faire le lendemain. J’ai pour ma part des CP et j’étais incapable d’aborder le sujet avec eux: trop violent,trop indigne de l’être humain. Alors j’ai décidé d’attendre les questions, les remarques… Malgré mon badge” je suis Charlie”, aucun commentaire jeudi, vendredi… certains parents m’ont remercié de ne pas avoir abordé le sujet, les mêmes vus avec leurs enfants aux rassemblements du jeudi, du week-end… Tous les élèves avaient envie d’en parler le lundi, tous ont vu, entendu…
Déferlement de violence, mais aussi vrai débat dans les familles, à l’école même chez les petits… quelques impressions par rapport aux commentaires des enfants: j’ai entendu , chose incroyable depuis quelques années et sans démagogie, des remarques positives sur les gendarmes, les policiers qui ont repris leur place de “gentils”, et puis des remarques sur la normalité de la mort des terroristes qui sont “méchants”. Difficile de se positionner avec neutralité parfois, et puis la liberté de la presse oui, alors que leur petit monde est centré sur eux, leur famille et qu’on leur répète qu’il n’est pas admissible de se moquer des camarades différents. Et la notion de caricature est à comprendre.l’école et les familles ont encore un long chemin à parcourir sur les notions des libertés,mais nos petits élèves sont sensibles et ne doutons pas que ce terrible drame nous permettra à tous d’avancer dans le sens de la liberté.
PS: Certains petits ont pensé que Charlie était un monsieur, compliqué quand même en CP d’aborder la lecture de Charlie Hebdo!!!
Courage à tous
Ce matin, un élève de GS a dit “il a fait un dessin comme Charlie Eldo”
J’ai demandé qui était Charlie Eldo
“Mais tu sais c’est le monsieur qui est mort”
Le dessin était une tête de bonhomme de neige avec un vieux chapeau troué et une pipe.
1980 : trop jeune pour avoir des souvenirs.
2001 : en vacances aux Antilles : j’ai vu les images en direct à la télé et je suis restée scotché devant la télé sans bien comprendre sur le coup le drame qui se jouait, mon conjoint au téléphone me disant “des tours comme celles-là ne peuvent pas s’effondrer…” Comme Martine étant originaire de Midi-Pyrénées, le 21 septembre a aussi été un choc d’autant plus que ma soeur se trouvait tout près sur la rocade à ce moment-là.
2015 : j’apprends la nouvelle en voiture sur France Inter alors que je pars acheter du matériel pour ma classe…Après de nombreux jours d’attente (car vivant en Martinique) j’ai enfin réussi à avoir mon exemplaire de Charlie Hebdo samedi dernier. Et puis il a fallu trouver des mots simples et justes pour expliquer à ma fille de 5ans pourquoi “Il y a beaucoup de personnes qui s’appellent Charlie “
1980 : pas vraiment de souvenirs…. j’ai découvert Lennon et sa bande bien plus tard…
11 septembre 2001 : je suis en classe avec mes GS…à la sortie en cherchant son fils , une maman et amie me dit : c’est la 3e guerre mondiale, des avions se sont crashé sur les tours… je rentre chez moi, j’allume la tv et je me prends les images en pleine figure. Mon fils de ç ans qui me dit: Maman c’est horrible… On avait tous compris que rien ne serait plus pareil…
7 janvier 2015 : j’ai appris la nouvelle en rentrant manger à midi…je n’ai pas réalisé tout de suite… je me souviens avoir envoyé un sms à mon fils : “c’est moche ce qui arrive à Charlie Hebdo” …et c’est là que j’ai réalisé…et j’ai pleuré… et là encore..et peut être encore plus, rien ne serait plus jamais pareil… je me suis abonnée à Charlie Hebdo un peu comme un acte militant…
A l’école pas de réactions immédiates des enfants….puis un matin cette phrase que j’attendais avec un peu d’inquiétude : ” Maîtresse, y des méchants qui ont tué des monsieurs parce qu’ils aimaient pas leur dessin”… “on n’a pas le droit de tuer pour ça, si on n’aime pas le dessin, on en fait un autre.” petite leçon de respect …..
Assassinat de Lennon, première soirée de ma promo à l’école normale, nous avons écouté les Beatles toute la soirée.
11 septembre, réunion de rentrée avec les parents de ma classe, nous n’avons pas beaucoup parlé pédagogie.
7 janvier, j’apprends ça en rentrant de l’école…
1980 : j’avais 12 ans et à la maison, on n’avait ni TV, ni culture musical. Je n’ai aucun souvenir de ce jour.
Septembre 2001 : j’étais à l’école et une jeune collègue est arrivée dans le bureau en disant :”Lais j’y étais il y a à peine 2 semaines, ce n’est pas possible, j’y étais!”Et elle pleurait, criait, pleurait encore et encore. Et nous on ne savait pas encore de quoi elle parlait. Et puis de retour à la maison, les images folles, inimaginables, terribles et tellement irréelles. On a eu peine à croire à tout ça.
2015 : Encore une fois j’étais à l’école et ce sont les parents à la sortie qui nous ont informées que quelque chose de grave était arrivé. Dans la voiture, France inter révèle le drame. Je ne comprends pas de suite la grvité de la situation. Puis les images TV de retour à la maison, toute la journée. Et encore le jeudi et encore le vendredi…. Un drame, une liberté s’écroule. Mais la France solidaire et la marche du dimanche fut une image très forte pour moi. Vraiment cette liaison de tous les gens, de tous horizons marchant ensemble.
La suite de la semaine : partage entre tristesse et déception de voir et d’entendre des médias donner la parole à des collégiens qui ne comprennent rien. Joie de voir les gens se réunir autour de Charlie et de communiquer, de s’écouter, de partager. Sourire aussi devant le clip tv de soutien à charlie hebdo et qui présente des citoyens très divers.
1980, j’avais 18 mois…
2001, j’étais à l’iufm… avec mes collègues futurs enseignants nous étions tous sous le choc… je me souviens du lendemain et des journaux avec ces images d’horreur circulaient dans le hall d’entrée… je me souviens de longues discussions autour de comment en parler aux enfants, comment les protéger…
2015, je ne l’ai su que tard, matinée difficile à l’école, je n’ai pas ouvert ni radio ni télé de la journée,en fin d’après midi, sur facebook je vois des tas de profils avec cette image fond noir et cette inscription “je suis Charlie” et je me demande mais c’est quoi ce truc??? Et là je découvre peu à peu l’horreur du truc…
1980: j’avais 8 ans… Je n’en ai pas de souvenirs.
11 septembre 2001: je me préparais pour aller à une réunion de cantine, quand la nouvelle est arrivée dans ma télé. Je me suis tombée dans le canapé et j’ai eu beaucoup de mal à retrouver la force d’aller à cette réunion…
7 janvier 2015: j’étais dans ma classe avec mes CP-CE1 au moment des faits mais je n’ai appris la nouvelle que l’après-midi par ma fille: Maman, t’as vu ce qui se passe à Paris?
Coup dur parce que j’ai grandi avec le club Dorothée et les dessins de Cabu…
Le lendemain, il a fallu en parler aux enfants, pour leur expliquer pourquoi on devait faire cette minute de silence… Difficile de trouver les mots… Depuis mon tableau, je voyais les drapeaux en berne de la mairie…
Et plus les jours passaient, plus notre République était atteinte dans ses valeurs. Ces valeurs si importantes à mes yeux…
Alors, la petite créole que je suis, s’est dit que j’avais un rôle à jouer dans tout ça…
J’ai lu à mes élèves les deux livres de Vittoria Facchini, moi j’aime pas les filles; moi j’aime pas les garçons. Ils ont bien ri…Puis je leur ai demandé pourquoi, je leur avais lu ça? Et mon petit Antonin a dit: “parce que c’est comme les caricatures des dessinateurs qui ont été tués!”
Je leur ai fait une leçon sur les différentes religions avec des images sur le tbi de cathédrales, de mosquées, de synagogues…
“Oh c’est beau, maîtresse!”
Je leur ai montré le dessin avec Jésus, Moïse et Mahomet qui regardent le monde s’entretuer et qui disent: “on leur a pourtant bien délivré tous les 3 le même message de paix!”
Je leur ai parlé de nos cimetières à la Réunion, ces jolis cimetières musulmans avec ces magnifiques frangipaniers.
Je leur ai montré les 3 symboles de chaque religion: la croix, l’étoile, et au moment où je dessinais le croissant et l’étoile, ils m’ont dit: il y a une étoile aussi, parce que c’est tout pareil!”
Et là, mon cœur s’est réchauffé: ils avaient compris! Mes petits bourguignons avaient compris que tous les hommes quelques soient leur couleur, leur religion, pouvaient vivre en paix! Comme sur notre si belle île! Et c’est pour ça qu’elle est belle notre île avec sa population issue de 4 continents, qui mêle ses croyances, ses coutumes et son sang…
Ils ont compris qu’à la Révolution les hommes se sont battus pour la liberté, l’égalité et la fraternité, et que c’est pour ça qu’aujourd’hui on est libre de choisir sa religion.
Depuis que je suis enseignante, j’essaie de transmettre ces valeurs à mes élèves, semer des graines de citoyens… Mais cette année j’y ai mis encore plus d’ardeur!
Et quelle soulagement quand j’ai lu dans le projet d’enseignement moral et civique que: “L’enseignement moral et civique se fait dans le cadre laïque. Ce cadre impose de la part des personnels de l’Éducation nationale une évidente obligation de neutralité, mais celle-ci ne doit pas conduire à une réticence, voire une abstention, dans l’affirmation des valeurs transmises.”
Seule l’ignorance amène la peur de l’autre…
décembre 1980 : 19 mois, je découvre les beatles plutôt vers 1990 sans savoir tout de suite que lennon a été assassiné
septembre 2001 : pendant un intercours dans mon école de parfumerie (je n’ai pas toujours été PE), un élève revient de la salle informatique où il vient de lire la nouvelle. on est tous descendu voir l’écran avec lui. la fin des cours a été très longue.
janvier 2015 : enceinte de mon 4ème (retranché autour de mon nombril depuis quelques temps), la voiture qui vient de mourir, la maison en construction, les 3 premiers et le quotidien à gérer, … quand je vais chercher mon mari au travail le soir (puisque l’on a qu’une seule voiture), il me demande si j’ai regardé les infos. je comprends tout de suite que quelque chose s’est passé. il commence à m’expliquer. Charlie Hebdo, je connais vaguement, Cabu, un peu plus (associé à Dorothée), … Mais pourquoi ? on a beau me dire que c’est à cause d’un dessin, je ne comprends toujours pas. je crois que je suis assez d’accord avec la remarque des enfants de la classe de marie-jeanne.
ce soir-là et les soirs suivants, on a allumé la télé sur les infos, chose que l’on ne fait jamais. d’habitude, on lit les infos sur internet.
j’apprécie de ne pas avoir été en classe en ce début de mois, je crois que j’aurais eu beaucoup de mal à en parler aux élèves.
1980 : je n’étais pas encore née.
2001 : je rentre du lycée mon frère sortant de l’école me demande d’allumer la télé, pas de dessins animés mais ces images d’horreur qui tournent en boucle sur toutes les chaînes.
janvier 2015 : je suis en vacances (vivant en nouvelle-calédonie), je me connecte sur facebook et voit que tous mes contacts affichent cette image “je suis charlie”, je cherche à en savoir plus, surfe, allume la télé et là l’horreur s’affiche, ma grande de 7 ans me demande des explications, “mais maman, pourquoi ?…”
1980, je suis petite, ça passe sans un bruit chez moi (pourtant je me souviens que “quelque chose à changer, l’air semble plus léger” de 1981).
2001 : je suis en classe , une collègue qui était rentrée chez elle nous raconte. Tout le monde pense à la troisième guerre mondiale. Je me souviens que je ne crois pas la collègue, c’est une chose tellement impossible…. pas de TV, les élèves vont me raconter les images … surréaliste
2015 : mercredi, je rentre chez moi après la classe, machinalement j’allume France cu, le Président parle, il semble grave et affecté, je comprends par déduction. Je reste scotché, je continue à préparer le repas radio éteinte, car mon enfant me tourne autour, mais la tête complètement prise. Mon mari rentre. “Tu as entendu ?”, un acquiescement et plus un mot avant la fin du repas pour protéger les enfants. Ecoute tous les deux de la radio, porte fermée ensuite. Et qu’est ce qu’on a pu en parler après. Manif dimanche avec les enfants.