Apprendre. Apprendre à apprendre. Etre son propre professeur pour des matières qu'on ne maîtrise pas. Impossible ? Pas du tout. Il suffit d'avoir les idées claires et de prendre quelques raccourcis, comme ceux indiqués par Tim Ferris dans son dernier bouquin. Et si on appliquait cette procédure à notre propre enseignement, non pas pour s'apprendre à soi-même, mais pour apprendre à nos élèves ?

Tim Ferris est un garçon fantasque. Il fait des expériences dont il est lui-même le cobaye.

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Source: 99u.com via Kevin on Pinterest

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Et ensuite, il en fait des bouquins…

Spécialisé dans les neurosciences (il est diplômé de Princeton), il a une idée fixe : trouver les moyens les plus directs pour améliorer nos résultats, dans tous les domaines. Physiques, mentaux, psychologiques, etc…

Il a mis au point et perfectionné une technique bien à lui pour apprendre en un temps record une langue étrangère. Il a appris le japonais en une année, le chinois mandarin en six mois, l'allemand en trois mois et l'espagnol en huit semaines.

Ah, j'ai oublié de vous dire que Tim est également un auteur à succès. Adulé par les uns, décrié, voire descendu en flammes par les autres. Il ne laisse pas indifférent. J'aime bien lire son blog de temps en temps, cela me permet de perfectionner mon anglais et de faire des découvertes insolites, même si sa culture très “américaine” est parfois difficilement compréhensible pour un français.

Son dernier livre (pas encore traduit en français à la date où cet article est écrit) s'appelle “The 4-Hour Chef”, traduction : “comment devenir un cuisinier-expert en quatre heures“. L'expression “en quatre heures” signifiant pour Tim : “en très peu de temps“.

Ce bouquin est très particulier. Il est une excuse, un prétexte pour pouvoir exposer la méthode personnelle de “méta-apprentissage” de l'auteur. Son discours est celui-ci : “avant d'apprendre à cuisiner, vous devez apprendre à apprendre, et je vais vous montrer comment je fais”.

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Comme un lego... © piai - Fotolia.com

Comme un lego…
© piai – Fotolia.com

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Ah, ça commence à devenir intéressant. Apprendre à apprendre. Qui sait ? d'”apprendre à apprendre” à “enseigner”, il n'y a qu'un pas.

Penchons-nous donc sur sa technique d'auto-apprentissage. Vous allez voir, nous sommes en terrain connu.

Tim Ferriss nous délivre une recette en quatre étapes et trois principes secondaires.

Les quatre étapes :

Première étape : la déconstruction.

Je considère que le domaine que je désire maîtriser est un édifice fait de briques. Je le démonte, je le déconstruis, je l'observe, j'identifie clairement chacune des briques.

Deuxième étape : la sélection.

Je fais un tri, et je ne conserve que les 20% de briques qui sont essentielles, et sur lesquelles je vais me focaliser.

Troisième étape : la mise en séquence.

Je vais placer mes briques sélectionnées dans un ordre stratégique, et je les aborderai en suivant cet ordre précis.

Quatrième étape : Les engagements

Ce sont des genres de contrats passés avec soi-même. Par exemple, ” si je ne respecte pas mon engagement à telle date, j'enverrai un don de 10 euros à une association que je déteste “. C'est ce qu'on appelle “l'anti-charité”, et il existe même un site web spécialisé dans ces “engagements” qui maintiennent la motivation – et la pression positive.

Comme le dit très bien Tim : ” un objectif sans conséquences n'est qu'un souhait “. Je vous laisse méditer…

Les trois principes secondaires :

La compression :

Je dois être capable de décrire mes 20% de briques sélectionnées sur une simple feuille de papier. La concision, la simplicité, la clarté sont synonymes d'efficacité.

La fréquence :

A quel rythme, à quelle vitesse vais-je aborder mon apprentissage pour des résultats optimaux ?

L'encodage :

Je vais chercher à relier mes nouvelles connaissances à des connaissances déjà acquises, ceci me permettant une meilleure mémorisation.

Cette “recette d'auto-apprentissage” suit une logique implacable. Elle donne une marche à suivre claire.
Les enseignants retrouvent un peu la même logique dans la définition de programmes, de programmations, de progressions, de séquences.

Insistons sur deux points :

Les deux points fondamentaux sur lesquels j'aimerais insister sont les suivants :

La simplification

Je me focalise sur les 20% indispensables, qui vont conditionner la réussite des 80% restants. Par exemple, pour faire le parallèle avec ma classe de grande section, dans le domaine de l'écriture, pour moi la lettre la plus importante, celle qu'il faut maîtriser avant de passer à la suite, est la petite lettre “c”.
Pourquoi ?

  • Parce que lorsqu'on sait tracer un “c”, on n'a plus besoin d'apprendre le sens de rotation du “o”, il va de soi, il suffit de “fermer” le c et on a un o.
  • Parce que lorsqu'on sait tracer un c, il est très simple d'écrire un a.
  • Parce que lorsqu'on sait écrire un a, on n'a pas de problèmes pour écrire un d ou un q.
  • Parce que lorsqu'on a compris le principe du changement de direction de la boucle du o, on est armé pour le r, le w et même le z.
  • Etc…

 

La compression

Si je suis capable d'écrire sur une simple feuille de papier – ou d'expliquer oralement – quelles sont les “briques” de base que je vais apprendre, j'y vois clair. Je n'ai plus ensuite qu'à suivre le chemin. Voir ici.

Faisons une expérience à notre tour…

Essayez, juste un instant, d'appliquer ces sept points à un domaine d'enseignement.

Tenez, par exemple, le langage oral : quelles sont, d'après vous, les “briques élémentaires” qu'un enfant doit maîtriser au cours de ses trois ans de maternelle pour pouvoir s'exprimer de manière correcte, et ensuite passer au perfectionnement de sa pratique ?

Bien sûr, il y aura le vocabulaire. La syntaxe. Les interactions. Mais encore ? Une des bibles en la matières, le livre de Philippe Boisseau, donne toutes les clés, et il fait 304 pages. Peut-on en quelque sorte “extraire son ADN” et appliquer les étapes de sélection, de séquençage et de compression ?

Allez, je vous passe le relais, vous avez la parole.

La stratégie de Tim n'empêche pas la liberté de l'élève et de l'enseignant, elle ne freine pas la spontanéité, ni l'utilisation du vécu personnel de l'enfant : elle nous permet simplement – entre autres choses – de nous focaliser sur le principal et de ne pas oublier les points essentiels.

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