Amazon, on aime ou on déteste. Ou les deux. Parce que cette méga-boîte américaine, fruit de la vision d'un homme qui a fait un parcours sans faute, peut être observée par différents prismes donnant des images bien différentes. Rien n'étant jamais tout noir ou tout blanc, il est intéressant de se pencher sur les trois aspects de cette entreprise née avec et par le web, en parodiant le titre du film de Sergio Leone : le bon, la brute et le truand…

Le bon

Le bon : Amazon est une entreprise-modèle par bien des aspects. Née sur un pari fou de Jeff Bezos (vendre des livres par correspondance sur Internet), elle n'a pas cessé de se développer tous azimuts, en utilisant avec une extrême intelligence toutes les ressources d'Internet, et en comprenant avant les autres ce qu'elle pouvait en tirer.

Champion de la logistique, Amazon fait également figure de précurseur et de poids lourds du “service web”, faisant transiter à bas prix sur ses serveurs les données de centaines de grosses entreprises et même de nombreux gouvernements. Un outil sans faille, qui héberge par exemple toutes les données de Dropbox, de Samsung ou de la SNCF.

Amazon a également inventé le principe de l'affiliation, méthode de rémunération et de distribution qui fait vivre des pans entiers du web.

La marque, spécialisée au départ dans le livre, a largement favorisé l'essor des livres électroniques, mais aussi de l'auto-édition avec la vente sur le réseau Kindle. Elle a permis aux personnes habitant dans les endroits les plus reculés de pouvoir se procurer à bas prix des ouvrages, depuis le best-seller du moment jusqu'au livre peu répandu et introuvable chez les petits libraires.

Mais ce n'est pas tout. Depuis 20 ans, Amazon ne fait pas de bénéfices, réinvestissant massivement toute sa trésorerie dans de nouveaux entrepôts géants et abaissant ses marges de manière significative, de manière à proposer au client le produit qu'il désire au prix le plus bas, livraison comprise.

Enfin, côté consommateur, c'est le bonheur, avec un SAV absolument exemplaire. Jeff Bezos a le culte du client, et cela se voit. Vous avez le moindre problème ? Vous trouvez facilement sur le site web les différents moyens de contacter le service adéquat, qui vous répond immédiatement avec une efficacité étonnante. Ce que bien d'autres entreprises très connues ne savent ou ne veulent visiblement pas faire.

La brute

Mais nous ne vivons pas dans le monde des Bisounours.

La croissance d'Amazon a son revers : les libraires traditionnels ferment boutique les uns après les autres, victimes de l'efficacité d'Amazon et de leur manque de réaction, compréhensible après tout : eux, ils sont des libraires, et non pas des méga-logisticiens vendeurs de livres réels et virtuels utilisant toutes les armes des nouvelles technologies dans un monde où Internet a tout chamboulé.

Les libraires ne sont pas les seuls à s'inquiéter à juste raison : c'est carrément tout le secteur du commerce mondial qui est impacté, jusqu'aux marchands de fruits et légumes, Amazon ayant commencé dans de grandes villes américaines à livrer, dans la journée, les produits frais directement chez le consommateur.

De plus, être employé d'Amazon, ce n'est pas de tout repos. En France ou en Allemagne, encore, ça va, les lois protégeant les employés et encadrant leur employeur. Et les syndicats sont vigilants (ils paralysent d'ailleurs pas mal les rouages bien huilés d'Amazon-Allemagne). Ce qui n'empêche pas Amazon de faire massivement appel à de la main d'oeuvre intérimaire, lui apportant une flexibilité calculée au plus serré et au plus rentable. Mais dans d'autres pays, où le code du travail est moins protecteur, les petites mains passent leurs journées à cavaler sans fin dans les rayonnages des entrepôts géants en subissant des cadences infernales.

Le truand

Comme toute multinationale, Amazon sait jouer avec les lois des différents pays pour “optimiser” sa fiscalité, en s'implantant dans des “paradis” (après tout, pourquoi vouloir aller en enfer ?) et en se débrouillant, par de multiples montages financiers, pour esquiver taxes et impôts.

Ce que ne peuvent pas faire, bien entendu, les “petits” qui se font manger tout crus par l'ogre…

De plus, certains prêtent à Amazon l'intention de relever massivement les prix une fois la concurrence suffisamment affaiblie, de manière à pouvoir engranger subitement des méga-bénéfices après les années de mise en place de toute la structure logistique.

Conclusion

Il n'y a pas de conclusion à cet article. Je suis bien incapable de qualifier Amazon de gentil ou de méchant, de prendre sa défense ou de dénoncer ses pratiques. Parce que les mauvais côtés de cette incroyable entreprise ne sont que les conséquences de son efficacité proche de la perfection.

Je me contenterai d'observer le monde en train de subir un bouleversement gigantesque, dont personne à l'heure actuelle ne peut évaluer les conséquences à moyen terme. Comme le dit Gilles Babinet dans son livre – bien entendu vendu sur Amazon 🙂 – l'ère numérique est un nouvel âge de l'humanité.

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